Je suis intervenu dans la discussion générale sur le projet de budget 2011 :
"Pour la première fois depuis des siècles, l’Europe, certes relayée par les États-Unis dans la seconde moitié du XXe siècle, n’est plus en position hégémonique. Elle doit trouver de nouveaux repères dans un monde devenu multipolaire et surtout compétitif, dont le centre de gravité se déplace vers l’Asie.
Dans ce contexte mouvant, notre pays a bien traversé la crise grâce à la politique avisée du Gouvernement, mais il doit continuer de se réformer en profondeur pour surmonter les problèmes structurels de son modèle économique et social.
J’en vois principalement deux :
Tout d’abord, l’endettement. C’est vrai, notre modèle est, non seulement financé par la solidarité, mais aussi, depuis 1976, par la dette. Cela ne peut plus durer. L’an prochain, la France sera peut-être le deuxième emprunteur public au monde après les États-Unis, avec 186 milliards d’euros, dont 92 milliards pour financer le déficit budgétaire. Le remboursement de la dette sera bientôt le premier poste de dépenses budgétaires de l’État.
Or, cela a été souligné plusieurs fois, l’électrochoc grec a démontré la vulnérabilité et la dépendance d’un État surendetté ; l’Irlande vient d’en faire l’expérience en empruntant à 6,5 % à dix ans. Une simple hausse des taux d’intérêt pourrait ainsi anéantir tous nos efforts de redressement des comptes publics.
Le redressement de nos finances publiques est désormais indispensable au retour d’une croissance soutenue, au lieu de la croissance plutôt atone que nous connaissons. De ce point de vue, les mesures que vous nous proposez, monsieur le ministre, vont dans le bon sens.
En effet, alourdir les prélèvements obligatoires, qui flirtent déjà avec les sommets, serait une grave erreur.
En effet, quand une très grande majorité de Français bénéficie de transferts sociaux, mais que ceux-ci ne suffisent pas à faire vivre décemment les plus pauvres, la solution ne consiste pas à les alourdir, mais à mieux les répartir en fonction des véritables besoins afin d’en alléger la charge.
Car les revenus bruts des salariés français sont trop durement ponctionnés, ce qui ampute leur pouvoir d’achat, qui constitue pourtant une source majeure de motivation au travail. Le RSA n’a-t-il pas été créé uniquement pour pallier la faiblesse de l’écart entre revenus sociaux et revenus du travail ?
Si nous devons améliorer le pouvoir d’achat, c’est également pour dynamiser notre économie. Au contraire, en pesant sur la consommation des ménages et en freinant la création d’emplois, les transferts sociaux massifs enferment notre pays dans le cercle vicieux du chômage de masse et du déclin collectif.
L’écart qui nous sépare de l’Allemagne est spectaculaire : en 2009, les prélèvements sociaux sur les salaires étaient de 83,2 % en France, contre 47 % en Allemagne. Le résultat est le suivant : nos coûts salariaux horaires sont supérieurs à ceux de l’Allemagne, tandis que nos salaires nets sont très nettement inférieurs aux siens.
Une autre conséquence en est l’aggravation des conditions de travail. En effet, le coût élevé du travail conduisant à rechercher une forte productivité, bon nombre de salariés français s’épuisent dans une course à la productivité qui constitue une source de stress permanent, tandis que la qualité des services se dégrade à mesure que l’on remplace les hommes – donc de l’emploi – par des machines. Sur ce dernier point, l’alerte récemment donnée par le Médiateur de la République devrait nous faire réfléchir.
Notre modèle tue le travail. Comment un pays peut-il survivre dans la compétition économique mondiale quand sa population travaille – globalement – si peu ? La fuite en avant sociale que nous pratiquons depuis plus de trente ans est un échec. Il nous faut rebâtir notre modèle économique et social pour donner un avenir à notre jeunesse et du travail à tous ceux qui n’aspirent qu’à vivre dignement.
Nous pourrons ainsi relancer notre outil industriel, qui ne représentait plus que 16 % de la valeur ajoutée en 2008, contre 22 % en 1998. Car ce recul n’est pas fatal, comme le montre la reprise économique allemande, fondée sur l’industrie. Encore faut-il s’attaquer aux causes profondes du problème. Ainsi, le financement de la protection sociale, que je viens d’évoquer, correspond à un surcoût de 400 euros par rapport à l’Allemagne sur un véhicule moyen, tandis que la parité entre euro et dollar pénalise les ventes d’Airbus. C’est pourquoi je soutiens toutes les mesures qui permettront de relancer notre outil industriel, qu’elles soient nationales, européennes ou internationales.
Après la suppression de la taxe professionnelle, qui pénalisait l’investissement, je songe à une fiscalisation qui permettrait de faire peser une part des charges sociales sur tous les produits, importés ou non, alors que les cotisations sociales ne pénalisent que les productions nationales.
Je pense également à la politique d’encouragement à la recherche et à l’innovation que vous menez résolument au moyen du crédit d’impôt recherche. Il faut conserver ce dernier ; mon collègue Bernard Carayon l’a fort bien dit à l’instant.
Je songe en outre au Grand emprunt et à la priorité accordée au budget de la recherche et de l’enseignement supérieur. Je pense enfin au combat légitime que vous menez, monsieur le ministre, pour parvenir à de justes parités monétaires.
Enfin, je fais partie de ceux qui ont signé l’amendement tendant à supprimer l’ISF et le bouclier fiscal. J’ai de la suite dans les idées : j’avais déjà formulé cette demande ici même le 2 février dernier. En effet, le bouclier fiscal est un symbole devenu politiquement négatif et trompeur et la gauche a réussi à faire croire à beaucoup de Français qu’avec les quelques 600 millions d’euros du bouclier, on résoudrait tous les problèmes financiers du pays.
Je suis donc satisfait de l’annonce d’une refonte de notre fiscalité l’an prochain. Vous pouvez compter sur mon soutien dans cette entreprise, monsieur le ministre."
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