Photo Conseil général
Depuis une dizaine d’années, le Conseil départemental a institué une politique de coopération décentralisée qui se concrétise principalement par des partenariats avec des collectivités territoriales en Afrique et au Liban pour financer des projets.
Mais la donne a profondément changé pour le Conseil départemental car pour la première fois de son histoire, la clôture des comptes de l’exercice 2014 fait apparaître un déficit du budget de fonctionnement de 4 millions d’euros, fort heureusement compensé par l’excédent de l’année 2013 (72 millions d’euros, merci au président Alain Schmitz).
Cette disette budgétaire oblige le Conseil départemental à réduire ses dépenses de façon rationnelle et équitable. C’est pourquoi je suis intervenu à la séance de vendredi dernier pour demander l’organisation d’un débat car il me semble que la coopération décentralisée ou au moins les montants qui lui sont alloués devraient faire l’objet d’un débat de fond pour plusieurs raisons :
Première raison : ce n’est pas une compétence du Conseil départemental, il n’y a donc aucune raison de sanctuariser les crédits de la coopération décentralisée.
Or les sommes en jeu ne sont pas négligeables : 872.368€ à l’automne 2014, 23.450€ le 29 mai et 767.871€ le 19 juin, soit 1.663.689€ sans compter les dépenses internes comme les frais de personnel et les frais de voyage. En moins d’un an, le montant cumulé dépasse largement le plafond de 1 Euro par habitant qui avait été fixé à la création du dispositif.
Or pendant que ces crédits partent vers des destinations lointaines, on nous propose de réduire les crédits aux associations sportives et culturelles, on rogne sur les crédits de fonctionnement des collèges, la politique environnementale est embryonnaire, les carrefours de la RN10 sont un chemin de croix pour les usagers, le très haut débit est en panne, etc…
Autrement dit, puisque nos moyens financiers ne sont plus ce qu’ils étaient, je considère que nous devons commencer par satisfaire les besoins des Yvelinois et repenser la coopération décentralisée. Rien à voir avec le cartiérisme qui critiquait le coût… de la colonisation !
Seconde raison : confier la gestion de ces crédits à un GIP ne me paraît pas justifié dans la mesure où la part du financement départemental est écrasante et le personnel issu du Conseil départemental.
Ce mode opératoire a pour effet de déposséder notre assemblée de son pouvoir de décision et de contrôle. Or c’est pour cela que nous sommes élus et que les électeurs nous accordent leur confiance. De plus la Cour des Comptes critique régulièrement ce type de dispositif à l’origine de nombreux déboires.
Troisième raison : si l’aide au développement fait débat depuis des décennies, le monde a profondément changé et les économies de nombreux pays africains sont entrées dans une phase de forte croissance.
Raison de plus pour écouter les voix africaines, je pense à L’Aide fatale de Dambisa Moyo, qui critiquent une aide au développement compassionnelle qui donne bonne conscience aux donateurs et fait le malheur de l’Afrique.
Un fin connaisseur de l’Afrique, Jean-Michel Severino, président d’un fonds d’investissement pour les PME africaines qualifie les entrepreneurs africains de « héros du quotidien » et fait remarquer avec humour qu’on « peut s’enrichir en Afrique sans être ministre ».
Alors que la France donne 10 milliards d’euros par an à l’Afrique et que des centaines de milliards de dollars ont été déversés sur l’Afrique par l’aide internationale, on s’interroge sur l’efficacité de l’aide dont les effets bénéfiques sont largement annihilés par l’impéritie politique, les conflits à répétition et la corruption.
Qui peut en douter ? En 1960, la Chine sort épuisée par le Grand Bond en Avant qui a affamé et tué des dizaines de millions d’habitants, au moment même où beaucoup de pays africains accèdent à l’indépendance : où en est la Chine aujourd’hui ? Où en est l’Afrique ?
En Ethiopie, près de la frontière de l'Erythrée - 2009
photo Yves Vandewalle
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