La mondialisation de l'économie nous donne une grande illusion : celle d'un monde plus ouvert et plus fluide, loin des frontières rigides qui jadis séparaient les peuples. C'est en partie vrai, notamment grâce aux progrès de tous les moyens de communication (de la voiture à internet, en passant par l'avion).
Pourtant, l'actualité apporte quotidiennement la preuve du poids de l'histoire et de la constance des rapports de force géopolitique.
La crise ukrainienne ne peut ainsi déboucher pacifiquement que sur une "finlandisation" de l'Ukraine (ou une partition qui n'est pas souhaitable) car la Russie ne peut pas laisser tomber dans l'orbite de l'Union européenne un territoire traditionnellement sous son influence.
Un de plus car la Russie a perdu toute son influence en Europe orientale depuis la fin de la guerre froide. Elle a laissé les Occidentaux bombarder la Serbie, son alliée de toujours, et séparer le Kosovo du reste de la Serbie en 2008, pendant que l'U.E. et l'OTAN élargissaient considérablement leur influence à l'Est. Dans un pays de tradition impérialiste, au nationalisme ombrageux, le retour en force de la Russie et l'affichage de sa puissance militaire n'ont rien de surprenant.
L'Afrique, elle, est encore minée par les conflits ethniques. Elle continue d'être le lieu d'affrontements d'une rare violence, des guerres intestines qui entravent aujourd'hui son développement économique et social et qui ont alimenté jadis les marchands d'esclaves. Une abomination qui a "saigné" l'Afrique pendant des siècles.
En méconnaissant les limites ethniques pour éviter une balkanisation du continent et permettre aux anciens Etats colonisateurs de conserver une influence sur leurs anciennes colonies, les frontières issues de la décolonisation ont délimité des Etats artificiels inspirés du modèle européen. Depuis leur indépendance, beaucoup de ces Etats peinent à forger une réelle unité nationale et les rivalités ethniques persistent. Il n'est pas rare qu'elles structurent leur vie politique.
Le paroxysme a probablement été atteint avec le génocide des Tutsis par les Hutus au Rwanda, mais aujourd'hui ce sont les affrontements entre les Nuers et les Dinkas qui alimentent la guerre civile dans le plus jeune Etat du continent, le Sud-Soudan.
Dans le Sahel, la dimension religieuse ajoute un élément de complexité comme on le vérifie en ce moment au Mali et en Centrafrique.
Dans un monde en mouvement, les rapports de force géopolitiques sont toujours d'actualité.
A lire : Robert D. Kaplan La Revanche de la Géographie
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