En 1947, le géographe Jean-François Gravier publiait un ouvrage appelé à faire date : Paris et le Désert Français. Il y dénonçait l'hypertrophie parisienne et le sous-développement de la province. Cet ouvrage fondateur a inspiré, au moins partiellement et pendant les décennies 1950 - 1960, une politique d'aménagement du territoire qui visait un nouvel équilibre en développant des métropoles régionales.
Avec un recul de plusieurs décennies, on peut affirmer que cette politique a produit les effets escomptés; les grandes métropoles régionales ont pris un essor considérable et leur attractivité est réelle.
Mais les géographes ont récemment mis en évidence une nouvelle ligne de fracture entre les grandes métropoles qui concentrent l'essentiel de la richesse et du dynamisme économique, et la France rurale qui s'enfonce dans un réel déclin économique et social alors qu'y vivent 60% des Français. Des Français "oubliés" qui éprouvent un réel sentiment d'abandon dans un pays où ce qui n'est pas médiatisé (comme les "quartiers") est souvent ignoré des responsables politiques.
Cette nouvelle fracture est grave, elle est d'abord économique et devrait conduire à un renouveau de la politique d'aménagement du territoire à l'abandon depuis plusieurs décennies.
En Ile de France, la loi en cours d'examen portant création de Paris Métropole (un nouvel échelon politico-administratif regroupant Paris et les départements de la petite couronne) entre dans cette logique hypercentralisatrice en marginalisant les départements de la grande couronne (dont les Yvelines) et les territoires ruraux de l'Ile de France.
Voilà qui éclaire sombrement le zèle que mettent les services de l'Etat (sur ordre de qui ?) à exiger la construction massive de logements sociaux (25%) dans de petites communes rurales du sud du Parc naturel régional de la haute vallée de Chevreuse, alors qu'elles n'ont ni emplois, ni transports en commun, ni les équipements collectifs indispensables pour accueillir un nombre important de nouveaux habitants, encore moins les services sociaux nécessaires à leur accompagnement. S'agirait-il d'éloigner du regard, dans de lointaines banlieues, celles et ceux que le "centre" ne veut plus voir ? Je n'ose y croire.
L'Etat a pourtant fait une étude foncière très fine de deux des 5 communes concernées, sur la base discutable de la construction de 100% de logements sociaux, sans aucune analyse des conséquences sur les équipements collectifs, ni sur les transports alors que les axes routiers sont déjà saturés matin et soir par les migrations alternantes. Il n'a pas osé soutenir l'hypocrisie d'un renouvellement urbain financièrement accessible car il est extrêmement coûteux de convertir un tissu pavillonnaire existant en habitat social !
J'espère obtenir un assouplissement de l'obligation à un taux de 10% de logements sociaux, conforme à la Charte du Parc naturel régional, afin de satisfaire les besoins locaux.
La politique d'aménagement du territoire est à réinventer... Rapidement et sans a priori idéologique.
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