Centralisme autoritaire, recul démocratique
Depuis la fin des années 1960/70 et la création des villes nouvelles, l'aménagement du territoire de l'Ile de France était à l'abandon. Sous l'impulsion de Nicolas Sarkozy et de Christian Blanc, le projet d'aménagement du Grand Paris a redonné toutes ses lettres de noblesse à l'aménagement du territoire avec la création du Grand Paris Express et de grands pôles de développement comme Paris-Saclay, tout en renouvelant la réflexion sur l'aménagement des villes avec l'Atelier du Grand Paris.
Dans ce processus, L'Etat jouait pleinement son rôle d'impulsion et de coordination, tout en respectant la démocratie locale puisque les grands projets d'aménagement étaient négociés entre l'Etat et les collectivités territoriales dans le cadre des Contrats de Développement Territoriaux (CDT).
De ce bel édifice, le gouvernement actuel a eu la sagesse de ne pas remettre en cause le Grand Paris Express (qu'il retarde par rapport au calendrier initial, ce qui constitue une grave erreur), ni les pôles de développement comme Paris-Saclay. En revanche, il remet en cause le mode de gouvernance fondé sur la négociation entre l'Etat et les collectivités territoriales pour le remplacer par un système centralisé et autoritaire qui constitue une régression démocratique.
En effet, le 23 juillet dernier, l'Assemblée nationale a adopté en première lecture un projet de loi intitulé Modernisation de l'action publique territoriale et affirmation des Métropoles.
1) L'article 12 crée une Métropole du Grand Paris, un établissement intercommunal qui regroupe Paris et les communes des trois départements de la petite couronne (Hauts de Seine, Seine Saint Denis et Val de Marne) en les fusionnant.
Ce regroupement peut être étendu à des intercommunalités limitrophes des départements de la grande couronne.
De fait, toute l'Ile de France sera placée sous l'influence et/ou l'autorité, avec des compétences très larges, de ce mastodonte qui fera concurrence à la Région Ile de France.
De plus, en séparant les compétences logement (Métropole) et transport (Région), on organise l'incohérence... alors que l'objectif affiché est de la renforcer...
C'est surtout une véritable atteinte à la démocratie car on donne presque tous les pouvoirs à une assemblée, le conseil de la métropole, dont la majorité pourra imposer ses vues sans véritables contre-pouvoirs. C'est de l'inédit à cette échelle. En population, L'Ile de France est plus grande que la Belgique ou la Suisse, deux pays fédéraux dont les institutions garantissent l'expression démocratique de leur diversité, ici on fait le contraire !
La troisième étape de la décentralisation annoncée pendant la campagne présidentielle de l'an dernier a cédé la place à une recentralisation anti-démocratique.
2) Les articles 10 et 11 concernent l'achèvement de la carte intercommunale dans les départements de la grande couronne (dont les Yvelines).
L'article 10 précise que si le siège d'une intercommunalité est situé dans l'unité urbaine de Paris (une entité géographique définie par l'INSEE qui compte 412 communes depuis 2010 dont 90 des 262 communes des Yvelines), elle doit compter au moins 200.000 habitants... Ce qui remet en cause le périmètre de CERTAINES intercommunalités... car une seule, Versailles Grand Parc, dépasse ce seuil.
A des mariages de raison, on va substituer des mariages forcés !
3) Un fonds de solidarité entre les départements d'Ile de France est créé. Il vient s'ajouter aux dispositifs de péréquation existants et laisse place à beaucoup d'incertitudes puisque ses modalités de fonctionnement et son montant seront définis en loi de finances. Le département des Yvelines, bien géré, a tout à craindre d'un dispositif qui répartit l'argent sans discernement.
4) En matière de logement, l'article 13 supprime l'Etablissement public foncier départemental des Yvelines au profit d'un Etablissement régional... Grave erreur de supprimer un établissement qui a fait ses preuves depuis sa création au profit d'un établissement dont le gigantisme lui fera perdre beaucoup d'efficacité faute de la relation de proximité qui est nécessaire pour traiter les questions foncières.
De quoi s'inquiéter pour la démocratie locale, celle qui est et devrait rester au contact direct de la population.